Comment repenser la mobilité après le Covid-19 ? Entretien avec le Mobility Advisor de BECI

avril 8, 2020

Pour comprendre l’impact du confinement et du Covid-19 sur la mobilité en Belgique, et plus spécifiquement à Bruxelles, nous nous sommes entretenus avec Ischa Lambrechts, Mobility Advisor du BECI (Chambre de commerce et d'industrie à Bruxelles).

Florence :

On remarque aujourd'hui que les voitures ne circulent que très peu. La mobilité est fluide, vélos et piétons sont plus nombreux. Quelles conclusions peut-on tirer de cette situation?

Ischa Lambrechts :

Il y a évidemment un impact positif sur la mobilité mais pour de mauvaises raisons. On ne peut pas s’en réjouir et se dire “Grâce à la crise on une meilleure mobilité”. C’est un faux raisonnement. Cependant il y a une opportunité que l’on peut constater, aujourd’hui, 90% des entreprises bruxelloises sont forcées de travailler à distance. Elles s’adaptent et repensent l'organisation du travail notamment avec des vidéoconférences. 

Il faut aussi prendre en compte les menaces engendrées par cette situation. Regardons, par exemple, le secteur de la mobilité partagée: le risque se pose à deux niveaux. La plupart des acteurs de la mobilité partagée sont des start-up, c’est donc une période difficile et compliquée pour eux car les citoyens ne se déplacent plus. Mais en dehors du problème qui touche leur chiffre d’affaires, la menace à long terme est que les habitudes de comportement des usagers tendent à changer. Ceux qui doivent encore se déplacer n’utilisent, aujourd'hui, plus les voitures partagées pour des raisons d’hygiène. On peut donc se demander si ils le referont à la sortie du confinement? Probablement, mais cela prendra du temps. 

Florence :

Quel impact cette mobilité va-t-elle avoir sur les entreprises? 

Ischa Lambrechts :

Si les embouteillages augmentent, cela va affecter l’économie au niveau du PIB mais cela aura également un impact sur les entreprises. On sait aujourd’hui qu’une voiture bloquée dans les embouteillages coûte aux entreprises environ 10€ par heure tandis qu’un poids lourd peut coûter jusqu'à 80€. L’impact réel est difficile à chiffrer car on n’a jamais vécu de telle situation. On peut par contre se baser sur l’exemple des attentats de 2016, après lesquels on a pu observer qu’il a fallu un à deux ans avant que la fréquentation des transports en commun ne revienne à la normale. On peut donc imaginer qu’on devra faire face à une situation similaire. Les usagers auront tendance à utiliser leurs voitures personnelles ce qui va avoir un impact sur l’encombrement des routes. 

Un autre impact direct pour les entreprises est que les employés seront bloqués dans ces embouteillages ce qui engendrera des pertes de temps, des retards, du stress et des frustrations. 

Florence :

Comment les habitudes des usagers vont-elles changer à la sortie du confinement? 

Ischa Lambrechts :

En ce qui concerne les distances courtes (de moins de 5km) l’utilisation des vélos partagés va peut-être augmenter car les usagers ont pris l’habitude et le plaisir de les utiliser. Le grand défi se trouvera plutôt au niveau des navetteurs habitant dans les autres régions. Environ 50% des travailleurs bruxellois habitent en Flandre ou en Wallonie. C'est pour ces personnes qu’il va falloir trouver des solutions, comme par exemple soutenir le télétravail, maintenant que nous avons pris l’habitude et que les infrastructures ont été mises en place. 

Florence :

Comment les entreprises doivent-elles organiser la mobilité une fois que nous pourrons retourner à une situation normalisée? 

Ischa Lambrechts :

Je dirais qu’il faut le plus vite possible reprendre nos habitudes tout en respectant évidemment les gestes barrières et les consignes d’hygiène. C‘est comme après un accident de voiture, il faut reprendre le volant le plus vite possible car psychologiquement c’est plus difficile si on attend. 

Mon deuxième conseil s’adresse plutôt aux entreprises. Il ne faut pas oublier les leçons et les opportunités qu’on a apprises. Si on a eu la capacité et la possibilité de faire du télétravail aujourd’hui on pourra encore l’appliquer demain. Cela pourrait permettre aux employés de ne pas se déplacer pendant les heures de pointe et ainsi éviter stress, frustration et perte de temps inutiles. Il faut se rendre compte que le télétravail est une vraie solution à la problématique de la mobilité des employés et de leur bien-être de manière plus générale. 

Nouveau call-to-action

Subscribe to blog updates